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Ingénieur et politique

Pour réfléchir

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01/02/2025

Face à des défis techniques complexes, et à une époque où les décisions politiques ont des implications technologiques profondes, l'expertise des ingénieurs pourrait bien être la clé d'une politique innovante. Pourtant, leur présence dans le domaine politique est encore marginale.

Comprendre les compétences uniques des ingénieurs

Les ingénieurs apportent une approche analytique et méthodique à la résolution de problèmes, une compétence souvent absente des débats politiques. Leur formation les pousse à comprendre et à décomposer les problèmes complexes, ce qui est essentiel pour naviguer dans les défis technologiques et environnementaux actuels. Les ingénieurs peuvent proposer des solutions techniques simples et concrètes (réparation et recyclage local, adaptation de la distribution de courant dans les habitations individuelles, solutions d’économie de déplacements inutiles, …).

Les ingénieurs sont passionnés par la résolution de défis techniques permettant de concevoir des solutions durables et à long terme. Leur curiosité scientifique les pousse à toujours en savoir plus. Ils sont en permanence motivés par l’amélioration de leurs propres connaissances et des compétences associées. Certains en profitent pour leur reprocher un comportement un peu nombriliste, voire narcissique. La réalité est qu’ils sont condamnés à toujours vouloir «faire mieux que ce qu’ils ont fait la veille». Mécaniquement ils tirent la société vers un objectif d’amélioration continue quel que soit le contexte (législatif, financier, politique, …).

Certaines formations initiales plus « compétitives » encourage davantage la mesure de la valeur individuelle en se comparant à ce que d’autres font ou auraient fait. L’objectif n’est plus l’amélioration de soi ou du système, mais de «faire mieux que les autres». Et cela ouvre des leviers d’actions tels que : la recherche permanente de justificatifs dans les crises contextuelles externes, ou la critique des actions des autres. En effet, pour être « le meilleur » ou « la meilleure », il suffit de rabaisser les autres, voire de les détruire. Et l’on voit bien des similitudes avec certains comportements publiques.

La valeur ajoutée des ingénieurs en politique

Les ingénieurs sont habitués à travailler en équipe, ce qui est crucial pour forger des alliances et construire des consensus au sein de l'arène politique. Leur capacité à échanger entre eux pour faire la différence entre ce qui est du domaine de l’opinion et ce qui est une réalité démontrable est également un atout dans la sphère politique.

De plus, ils peuvent contribuer à des politiques plus efficaces, fondées sur des données probantes et une compréhension technique approfondie. Cela améliorerait la formulation des politiques publiques, notamment dans des domaines tels que l’environnement, l'énergie, les transports, les bâtiments, infrastructures et la sécurité. Leurs compétences techniques et leur aversion aux risques non maîtrisés sont des atouts précieux pour garantir des solutions optimisées et résilientes plutôt que des décisions idéologiques et n'ayant pas d'autre perspective que la prochaine échéance politique.

Surmonter les défis pour intégrer les ingénieurs en politique

Aujourd’hui, la préparation politique traditionnelle ne met pas suffisamment l'accent sur les compétences techniques. Les cursus académiques en sciences politiques ou en droit, par exemple, n'intègrent pas de manière systématique l'enseignement de compétences techniques, ce qui peut décourager les ingénieurs à s'orienter vers ces carrières.

De leur côté, les ingénieurs et scientifiques eux-mêmes sont coupables de la situation. Ils perçoivent le monde politique comme opaque, bureaucratique, et tellement éloigné de leurs quotidiens. Ils peuvent avoir l’impression de perdre leur temps à vouloir convaincre de réalités qui leur paraissent si évidentes qu’il faut vraiment « être inculte » pour les remettre en question.

L’autre obstacle majeur à l’engagement des ingénieurs en politique est l’impact que cela aura sur leur propre carrière de scientifique. En effet, la science continue d’avancer pendant que certains passent du temps à l’expliquer aux non scientifiques.

Pour surmonter ces défis, il serait pertinent de favoriser la curiosité civique des ingénieurs en leur faisant apparaître la communication de leurs savoirs comme un nouveau défi scientifique. De même, une meilleure reconnaissance du travail des vulgarisateurs scientifiques et passeurs de sciences qui est une forme d’engagement politique, permettait également de développer l’envie d’action publique dans la communauté scientifique.

Renforcer la présence des ingénieurs en politique

La capacité à intégrer les compétences techniques dans les processus de décision politique est l’un des enjeux d'avenir de nos sociétés. Encourager les ingénieurs à s'investir en politique est donc essentiel pour naviguer dans un monde de plus en plus complexe et interconnecté. En renforçant leur présence, nous pouvons espérer des politiques publiques plus innovantes et adaptées aux défis contemporains. Il est temps de reconnaître la valeur des ingénieurs dans la sphère politique et de créer les conditions pour qu'ils puissent contribuer pleinement. La prochaine génération de leaders devra être aussi à l'aise avec la technologie qu'avec une loi, et les ingénieurs sont bien placés pour combler cet écart. Ce n'est qu'en collaborant et en intégrant toutes les compétences disponibles que nous pourrons construire un avenir résilient et prospère pour nos sociétés.


Cet article a été publié par Jean Dambreville, DG d 'IESF dont l'AIESME est membre 

(NDLR) Ce sujet faisait l'objet d'un chapitre du Livre Blanc publié par IESF (voir ici)

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